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    La Femme d’un autre (French Edition)

    Por Fédor Dostoïevski

    Sobre

    Extrait :
    Permettez-moi, monsieur, de vous demander…
    Le passant tressaillit et, quelque peu effrayé, considéra le personnage à grande pelisse qui lui adressait ainsi la parole à brûle-pourpoint, vers huit heures du soir, au milieu de la rue (lieu et heure, — on le sait assez  ! — où un individu abordé à l’improviste par un Pétersbourgeois a tout droit de s’effrayer).
    Donc, le passant tressaillit et s’effraya.
    — Pardonnez-moi de vous déranger, reprit le monsieur à la pelisse, mais je… je… je ne sais… Vous voudrez bien m’excuser, vous voyez dans quel état je suis  !…
    Le jeune homme au paletot remarqua seulement alors que le monsieur à la pelisse était en proie à un trouble extrême. Pâle, défiguré, la voix tremblante, il n’avait évidemment pas la pleine possession de ses facultés  : la parole lui manquait, on voyait qu’il souffrait beaucoup d’être obligé d’adresser une prière à un individu qui appartenait peut-être à une classe inférieure de la société. D’ailleurs, ces manières étaient, certes, de la dernière inconvenance de la part d’un homme vêtu d’une pelisse si confortable, d’un frac si à la mode, un frac d’un vert sombre si distingué, un frac chamarré de décorations si significatives  ! Visiblement impressionné par ces considérations, le monsieur à la pelisse s’efforça de maîtriser son émotion et de donner un dénoûment convenable à la désagréable scène qu’il avait lui-même provoquée.
    — Pardonnez-moi, je n’ai pas toute ma présence d’esprit, mais vous ne me connaissez pas… Je regrette de vous avoir dérangé, j’ai changé d’intention…
    Il souleva poliment son chapeau et s’éloigna.
    — Mais faites donc  !
    L’inconnu disparut dans l’obscurité, laissant très-étonné le jeune homme au paletot.
    — Quel singulier individu  ! pensait-il.
    Puis, après s’être suffisamment émerveillé, il se rappela ce qu’il avait à faire et se reprit à arpenter le trottoir en surveillant attentivement la porte d’une grande maison à plusieurs étages. Le brouillard commençait à tomber, et le jeune homme s’en réjouissait, car, à la faveur du brouillard, il passerait inaperçu (personne d’ailleurs ne pouvait remarquer sa promenade obstinée, personne, sauf un indifférent cocher resté là, toute la journée, sur son siége).
    — Pardonnez…
    Le passant tressaillit de nouveau  : c’était encore le monsieur à la pelisse.
    — Excusez mes importunités… Vous êtes probablement noble  ? Mais ne me jugez pas trop strictement d’après le code des usages mondains… Eh  ! qu’est-ce que je vous dis là  ?… Concevez-vous qu’un homme…  ? Monsieur, vous voyez un homme qui a une prière à vous adresser…
    — Si je puis… Que désirez-vous  ?
    — Peut-être pensez-vous déjà que je vais vous demander de l’argent  ? dit l’homme mystérieux en pâlissant tout à coup et en tordant ses lèvres dans un rire hystérique.
    — Que dites-vous là  ?
    — Non, je vois que je vous suis désagréable. Pardonnez-moi, je le suis à moi-même. Vous me voyez très-agité, presque affolé, mais n’allez pas en conclure…
    — Au fait  ! au fait  ! interrompit le jeune homme impatienté, tout en hochant la tête pour encourager son bizarre interlocuteur.
    — Bon  ! voilà que vous, un jeune homme, vous me rappelez au fait comme si j’étais un petit garçon négligent. Vraiment, il faut que j’aie perdu l’esprit… Qu’en dites-vous  ? Suis-je assez humilié  ? Répondez franchement.
    Le jeune homme paraissait embarrassé, il ne répondit pas. L’homme à la pelisse prit enfin un parti  :
    — Permettez-moi, dit-il d’un ton décidé, de vous demander si vous n’avez pas vu une certaine dame. C’est là toute ma prière.
    — Une dame  ?
    — Oui, une certaine dame.
    — Si j’ai vu… Mais il en passe tant  !…
    — C’est cela, reprit l’original avec un sourire amer, je divague  ! Allons, ce n’est pas cela que je voulais vous demander  ; je voulais dire  : N’avez-vous pas remarqué une certaine dame, vêtue d’un manteau fourré de renard, avec une capote en velours sombre et une voilette noire  ?
    — Non, je n’ai rien vu de tel, il ne me semb
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