Les événements que nous allons rapporter sont arrivés vers le milieu du dernier siècle, antérieurement à cette lutte qu’il est à la mode d’appeler, en Amérique, — l’ancienne guerre contre la France. — La scène qui ouvrira notre histoire doit pourtant se chercher dans l’autre hémisphère, et sur la côte de la mère-patrie. Au milieu du xviiie siècle, les colonies américaines étaient des modèles de loyauté. La guerre à laquelle il vient d’être fait allusion avait été cause des dépenses considérables qui avaient porté le ministère anglais à avoir recours au système de taxes qui amena la révolution. La querelle de famille n’était pas encore commencée. Entièrement occupés d’une guerre qui ne se termina pas plus glorieusement pour les armes britanniques qu’avantageusement pour les possessions anglaises en Amérique, les habitants des colonies n’avaient peut-être jamais été plus favorablement disposés à l’égard de la métropole qu’à l’instant où notre histoire va commencer. Toutes leurs anciennes prédilections, bien loin de s’affaiblir, semblaient prendre de la force, et, de même que dans la nature on sait que le calme succède à la tempête, l’attachement aveugle des colonies à la métropole n’était que le précurseur du mécontentement et de la désunion violente qui devait bientôt avoir lieu.
La supériorité de la marine anglaise fut bien établie dans les divers combats qui eurent lieu entre 1740 et 1763 ; mais la guerre maritime à cette époque n’avait pas encore pris le caractère décidé dont elle porta l’empreinte un quart de siècle plus tard. De notre temps la marine anglaise paraît s’être améliorée en proportion de ce que celle de ses ennemis se détériorait. Cependant, en 1812, le Grec se trouva en face du Grec, — et ce fut alors que vint véritablement — le fort de la guerre. — Le grand changement qui survint dans toutes les autres marines de l’Europe fut uniquement la suite des révolutions qui envoyèrent en exil les hommes expérimentés, et qui, en rendant les armées de terre de première importance pour maintenir l’existence des différents états, laissèrent dans l’ombre les entreprises navales, pour donner au courage et au talent une direction différente et exclusive. Pendant que la France guerroyait, d’abord pour maintenir son indépendance, et ensuite pour dominer tout le continent, la marine n’était qu’un objet secondaire pour elle, car elle n’avait pas besoin de son aide pour entrer à Vienne, à Berlin et à Moscou. C’est dans cette cause et dans d’autres semblables qu’il faut chercher l’explication des nombreuses victoires remportées sur mer par les armes britanniques pendant la grande lutte qui avait lieu en Europe. Elles étaient invincibles en apparence plutôt qu’en réalité, car beaucoup de défaites bien constatées se mêlèrent même alors à ses mille triomphes.
Depuis le temps où sa population put fournir des secours de cette nature, jusqu’au jour de sa séparation, l’Amérique eut sa bonne part dans les exploits de la marine anglaise. Les colons du rang le plus distingué plaçaient volontiers leurs fils dans la marine royale et bien des pavillons flottaient, à la fin du xviiie siècle, au haut des mâts de bâtiments du roi, comme autant de symboles faisant reconnaître des amiraux qui étaient nés parmi nous. Dans le cours d’une vie fertile en événements, nous avons vu des hommes d’autant de rangs, de conditions et de caractères que qui que ce soit puisse jamais en avoir connu ; et nous nous sommes trouvé en contact avec non moins de huit amiraux anglais nés en Amérique, quoique nous n’ayons jamais eu le bonheur de voir un de nos compatriotes élevé à ce rang par son propre gouvernement. Dans une certaine occasion, un Anglais qui avait occupé la plus haute place civile dans le département de la marine, nous dit que le seul homme qu’il connût alors dans la marine, en qui il aurait une confiance entière pour lui donner un commandement important, était...
La supériorité de la marine anglaise fut bien établie dans les divers combats qui eurent lieu entre 1740 et 1763 ; mais la guerre maritime à cette époque n’avait pas encore pris le caractère décidé dont elle porta l’empreinte un quart de siècle plus tard. De notre temps la marine anglaise paraît s’être améliorée en proportion de ce que celle de ses ennemis se détériorait. Cependant, en 1812, le Grec se trouva en face du Grec, — et ce fut alors que vint véritablement — le fort de la guerre. — Le grand changement qui survint dans toutes les autres marines de l’Europe fut uniquement la suite des révolutions qui envoyèrent en exil les hommes expérimentés, et qui, en rendant les armées de terre de première importance pour maintenir l’existence des différents états, laissèrent dans l’ombre les entreprises navales, pour donner au courage et au talent une direction différente et exclusive. Pendant que la France guerroyait, d’abord pour maintenir son indépendance, et ensuite pour dominer tout le continent, la marine n’était qu’un objet secondaire pour elle, car elle n’avait pas besoin de son aide pour entrer à Vienne, à Berlin et à Moscou. C’est dans cette cause et dans d’autres semblables qu’il faut chercher l’explication des nombreuses victoires remportées sur mer par les armes britanniques pendant la grande lutte qui avait lieu en Europe. Elles étaient invincibles en apparence plutôt qu’en réalité, car beaucoup de défaites bien constatées se mêlèrent même alors à ses mille triomphes.
Depuis le temps où sa population put fournir des secours de cette nature, jusqu’au jour de sa séparation, l’Amérique eut sa bonne part dans les exploits de la marine anglaise. Les colons du rang le plus distingué plaçaient volontiers leurs fils dans la marine royale et bien des pavillons flottaient, à la fin du xviiie siècle, au haut des mâts de bâtiments du roi, comme autant de symboles faisant reconnaître des amiraux qui étaient nés parmi nous. Dans le cours d’une vie fertile en événements, nous avons vu des hommes d’autant de rangs, de conditions et de caractères que qui que ce soit puisse jamais en avoir connu ; et nous nous sommes trouvé en contact avec non moins de huit amiraux anglais nés en Amérique, quoique nous n’ayons jamais eu le bonheur de voir un de nos compatriotes élevé à ce rang par son propre gouvernement. Dans une certaine occasion, un Anglais qui avait occupé la plus haute place civile dans le département de la marine, nous dit que le seul homme qu’il connût alors dans la marine, en qui il aurait une confiance entière pour lui donner un commandement important, était...