Il est possible que quelques-uns de ceux qui liront ce livre désirent savoir de quelle manière le manuscrit est tombé entre mes mains. Ce désir est trop juste et trop naturel pour ne pas le satisfaire ; je le ferai le plus brièvement possible.
Pendant l’été de 1828, tandis que je voyageais dans ces vallées de la Suisse qui sont situées entre les deux grandes chaînes des Alpes, et où le Rhône et le Rhin prennent naissance, j’avais passé de la source du second de ces fleuves à celle du premier, et j’avais atteint cet endroit des montagnes si célèbre sous le nom de Glacier du Rhône, quand le hasard me procura un de ces moments sublimes de solitude, d’autant plus précieux dans l’hémisphère de l’ancien monde qu’ils y sont plus rares. De tous côtés la vue était bornée par de hautes montagnes raboteuses, dont les pics étincelaient sous les rayons du soleil ; et en face de moi, au niveau de mes yeux, était cette miraculeuse Mer de Glace, dont le suintement forme le Rhône, qui va porter au loin ses eaux écumantes dans la Méditerranée. Pour la première fois, pendant un voyage de bien des années, je me sentis seul avec la nature en Europe. Hélas ! cette jouissance fut aussi courte et aussi perfide que le sont toujours des jouissances semblables au milieu des cohues de l’ancien monde. Des voyageurs, suivant l’étroit sentier, et marchant à la suite les uns des autres, tournèrent l’angle d’un rocher ; c’étaient deux dames à cheval, suivies de deux hommes à pied et précédées d’un guide, suivant l’usage. Le moins que je pouvais faire était de me lever pour saluer les premières, aux yeux doux, aux joues vermeilles, quand elles passèrent devant moi. Elles étaient Anglaises, et leurs compagnons parurent me reconnaître pour un compatriote.
Pendant l’été de 1828, tandis que je voyageais dans ces vallées de la Suisse qui sont situées entre les deux grandes chaînes des Alpes, et où le Rhône et le Rhin prennent naissance, j’avais passé de la source du second de ces fleuves à celle du premier, et j’avais atteint cet endroit des montagnes si célèbre sous le nom de Glacier du Rhône, quand le hasard me procura un de ces moments sublimes de solitude, d’autant plus précieux dans l’hémisphère de l’ancien monde qu’ils y sont plus rares. De tous côtés la vue était bornée par de hautes montagnes raboteuses, dont les pics étincelaient sous les rayons du soleil ; et en face de moi, au niveau de mes yeux, était cette miraculeuse Mer de Glace, dont le suintement forme le Rhône, qui va porter au loin ses eaux écumantes dans la Méditerranée. Pour la première fois, pendant un voyage de bien des années, je me sentis seul avec la nature en Europe. Hélas ! cette jouissance fut aussi courte et aussi perfide que le sont toujours des jouissances semblables au milieu des cohues de l’ancien monde. Des voyageurs, suivant l’étroit sentier, et marchant à la suite les uns des autres, tournèrent l’angle d’un rocher ; c’étaient deux dames à cheval, suivies de deux hommes à pied et précédées d’un guide, suivant l’usage. Le moins que je pouvais faire était de me lever pour saluer les premières, aux yeux doux, aux joues vermeilles, quand elles passèrent devant moi. Elles étaient Anglaises, et leurs compagnons parurent me reconnaître pour un compatriote.