Extrait :
« Halte là, maquignon ! » et il vit le châtelain ouvrir une fenêtre et lui faire signe de s’arrêter.
« Qu’y a-t-il donc encore ? » se demanda-t-il à lui-même en arrêtant ses chevaux.
Le châtelain accourut, achevant de boutonner sa veste sur son large ventre, et, tout en jurant contre le froid et la pluie, il demanda à Kohlhaas son passe-port.
« Mon passe-port ! dit celui-ci, je n’en ai point. » Alors le châtelain, le regardant de travers, lui apprit qu’aucun marchand ne pouvait passer des chevaux sur la frontière sans une autorisation légale. Kohlhaas protesta qu’il avait passé dix-sept fois la frontière sans rien de semblable ; qu’il connaissait parfaitement les réglemens du pays sur son commerce ; et que sans doute il y avait là-dedans une erreur à laquelle il le priait de réfléchir, sans l’arrêter plus long-temps, sa course du jour devant être encore très-longue. Mais le châtelain déclara qu’il ne passerait point ainsi pour la dix-huitième fois, parce que les réglemens avaient changé, et qu’il devait livrer son passe-port, ou retourner le chercher. Le maquignon, que cette vexation commençait à aigrir, descendit de cheval ; après avoir réfléchi un instant, il dit qu’il voulait parler au seigneur de Tronka ; puis il entra au château, suivi du châtelain, qui murmurait entre ses dents et le mesurait d’un air de mépris.
« Halte là, maquignon ! » et il vit le châtelain ouvrir une fenêtre et lui faire signe de s’arrêter.
« Qu’y a-t-il donc encore ? » se demanda-t-il à lui-même en arrêtant ses chevaux.
Le châtelain accourut, achevant de boutonner sa veste sur son large ventre, et, tout en jurant contre le froid et la pluie, il demanda à Kohlhaas son passe-port.
« Mon passe-port ! dit celui-ci, je n’en ai point. » Alors le châtelain, le regardant de travers, lui apprit qu’aucun marchand ne pouvait passer des chevaux sur la frontière sans une autorisation légale. Kohlhaas protesta qu’il avait passé dix-sept fois la frontière sans rien de semblable ; qu’il connaissait parfaitement les réglemens du pays sur son commerce ; et que sans doute il y avait là-dedans une erreur à laquelle il le priait de réfléchir, sans l’arrêter plus long-temps, sa course du jour devant être encore très-longue. Mais le châtelain déclara qu’il ne passerait point ainsi pour la dix-huitième fois, parce que les réglemens avaient changé, et qu’il devait livrer son passe-port, ou retourner le chercher. Le maquignon, que cette vexation commençait à aigrir, descendit de cheval ; après avoir réfléchi un instant, il dit qu’il voulait parler au seigneur de Tronka ; puis il entra au château, suivi du châtelain, qui murmurait entre ses dents et le mesurait d’un air de mépris.