Une foule énorme se pressait, ce soir-là, — un des derniers du mois de février 188., — dans les salles de la maison de jeu de Monte-Carlo. C’était un de ces instants, passagers mais bien connus de ceux qui ont hiverné une saison sur la Corniche, où un prodigieux et soudain afflux d’humanité composite transfigure cet endroit, si vulgaire d’habitude et par son luxe brutal et par la qualité des êtres auxquels il suffit. La furie de plaisir déchaînée à travers Nice durant ces quelques semaines du Carnaval attire sur ce petit coin de la Rivière la mouvante légion des oisifs et des aventuriers ; la beauté du climat y retient par milliers les malades et les lassés de la vie, les vaincus de la santé et du sort ; et, par certaines nuits, lorsque d’innombrables représentants de ces diverses classes, épars d’ordinaire le long de la côte, s’abattent à la fois sur le Casino, leurs caractères fantastiquement disparates éclatent en de folles antithèses. Cela donne l’impression d’une sorte de pandémonium cosmopolite, tout ensemble éblouissant et sinistre, étourdissant et tragique, bouffon et poignant, où auraient échoué les épaves de tous les luxes et de tous les vices, de tous les pays et de tous les mondes, de tous les drames aussi et de toutes les histoires. Dans cette atmosphère étouffante et dans ce décor d’une richesse insolente d’abus et ignoble de flétrissure, les vieilles monarchies étaient représentées par trois princes de la maison de Bourbon, et les modernes par deux arrière-cousins de Bonaparte, tous les cinq reconnaissables à leur profil où se reproduisaient, en vagues mais sûres ressemblances, les effigies de quelques-unes des pièces, jaunes ou blanches, éparses sur le drap vert des tables. Ni ces princes ni leurs voisins n’y prenaient garde, non plus qu’à la présence d’un joueur qui avait porté le titre de roi dans un des petits États improvisés à même la péninsule
une idylle tragique (French Edition)
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